Nos anciens des FAG ont beaucoup de choses à raconter, et pour une fois, nous allons faire un tour de l’autre côté de l’Atlantique, avec les récits de deux sauvetages par hélicoptère, réalisés en septembre 1980, et que nous confie Jacques UFFERTE, alors qu’il était affecté comme pilote et commandant du détachement aérien de gendarmerie de Cayenne en Guyane française.
Ces deux aventures sont arrivées à une semaine d’intervalle, elles ont fait l’objet, à la demande du commandant de groupement de gendarmerie de la Guyane, d’une fiche qui retrace le récit de ces deux aventures où des infortunés marins ont dû leur survie à l’intervention d’un équipage des Formations Aériennes.

Vue aérienne de Cayenne dans les années 80 – Photo de Jacques Ufferte.

SAUVETAGE DU 8 SEPTEMBRE.

Le 8 septembre 1980 à 8H30, nous décollons sur ordre du commandant de groupement pour rechercher une embarcation disparue avec cinq personnes à bord.

Dans l’hélicoptère se trouvent : le MDLC* UFFERTE (pilote), le MDLC EMCH (mécanicien-treuilliste), le gendarme HENRY (mécanicien-treuilliste) et l’adjudant COAT (plongeur).

* MDLC : maréchal-des-logis chef.

Jacques UFFERTE a terminé sa carrière de pilote avec plus de 3000 heures de vol. Il est titulaire de la médaille militaire, de la médaille du secours en montagne, de la médaille de bronze pour acte de courage et de dévouement et de la médaille d’argent de la défense nationale.

La mission a pour but, dans un premier temps, de vérifier une information selon laquelle une embarcation se trouverait échouée à la pointe Macouria et si le résultat est négatif, l’ordre nous est donné d’effectuer une recherche dans l’embouchure de la rivière de Cayenne et autour des îlets environnants, sans toutefois dépasser plus d’une heure de potentiel.

La zone de recherches en début de mission, à l’embouchure de la rivière Cayenne. ©IGN 2022

Aucun bateau ne se trouve à l’endroit indiqué. Sur demande de l’Administrateur des Affaires Maritimes venu à la station radio du groupement, les recherches sont orientées vers l’îlet « Enfant perdu », puis vers celui du « Malingre ».

A environ cinq cents mètres au nord de ce dernier, nous apercevons l’avant retourné d’une embarcation dépassant légèrement à la surface des flots. Il n’est pas possible de l’identifier.

L’Alouette lors des opérations de ravitaillement des postes isolés, ici Camopi sur l’Oyapok.

La découverte est signalée par radio au groupement. Aucune personne ne se trouve à proximité. Nous orientons nos recherches vers l’îlet tout proche, sans résultat. Nous nous dirigeons alors dans le lit du courant vers l’îlet « Enfant perdu » et de la pointe Macouria.

Le crédit horaire accordé étant épuisé, l’appareil rentre à sa base à 9H35.

A 10H00, nous recevons un nouvel ordre de décollage pour rechercher les disparus dans la zone côtière entre Cayenne et Kourou.

Dans l’hélicoptère se trouvent : le MDLC UFFERTE (pilote), le MDLC EMMENDOERFER (mécanicien-treuilliste), le gendarme HENRY (mécanicien-treuilliste) et l’adjudant COAT (plongeur).

La zone définie après la découverte de l’épave du bateau à l’îlet du Malingre. ©IGN 2022

Après une heure de recherches dans un triangle ayant pour base la pointe Macouria et l’îlet « Enfant perdu » et pour sommet la plage de Kourou, quatre personnes équipées de gilets de sauvetage et agrippées à un bidon sont repérées. Nous les situons à environ quatre kilomètres de la côte, dans le nord de Tonate.

Un canot de sauvetage « Chaîne SERVAUX 632 » à gonflement automatique leur est envoyé, mais il ne fonctionne pas.

L’adjudant COAT se porte volontaire pour descendre dans l’eau, initier et sangler les naufragés en vue d’un hélitreuillage à chaque rotation.

Le gendarme HENRY, nouvellement affecté, et ayant pris le travail le matin même est déposé au plus près sur une piste, en bordure de la RN 1. Il est chargé d’orienter les ambulances demandées par nos soins par l’intermédiaire de la radio et de récupérer les naufragés à chaque rotation.

Jacques UFFERTE aux commandes d’une Alouette 2.

De retour vers les gens en détresse, l’adjudant COAT est descendu au treuil. Suivant nos indications, il essaie de faire fonctionner le canot largué, mais n’y arrive pas. Toujours suivant nos instructions, il sangle les gens (un à un à chaque rotation) et leur indique la position à garder pour la montée au treuil.

Le travail de récupération se déroule normalement.
Sont hissés dans l’ordre :
Mme Isabelle VERDEROSA

Mr Patrick PULCHERY
Mr Victor PULCHERY
et Mr Christian VERDEROSA

Les quatre naufragés, dont les deux premiers sont en très mauvais état physique, sont pris en charge par les pompiers de CAYENNE et dirigés vers l’hôpital SAINT-DENIS où ils sont admis en réanimation et en chirurgie.

L’appareil rejoint la base à 12H15.

D’après les renseignements recueillis au cours du sauvetage, le naufrage aurait eu lieu le 7 septembre à 9H00.

La cinquième personne, Claude VERDEROSA, époux d’Isabelle, n’ayant pas de gilet de sauvetage se serait dirigé à la nage vers l’Ilet « Le Malingre ».

A 14H30, deux éléments du Groupe d’Intervention de Guyane sont déposés par nos soins sur cet îlet.

Dans l’hélicoptère se trouvent : Le MDLC UFFERTE (pilote), le MDLC EMCH (mécanicien-treuilliste), le MDLC IACONO du GIG et le gendarme BELTRAN du GIG.

Ces deux militaires sont chargés de s’assurer que le disparu ne se trouve pas à l’abri à l’intérieur de la végétation. Le résultat est négatif.

Le 9 septembre, à 14H50, sur ordre du commandant de groupement, nous décollons à nouveau pour deux heures de vols, afin de rechercher Claude VERDEROSA, dans la zone explorée la veille. Ces recherches sont également infructueuses et l’appareil rejoint sa base à 16H55.

Pour ce vol, sont dans l’hélicoptère : le MDLC UFFERTE (pilote), le gendarme HENRY (mécanicien-treuilliste), le MDLC MICHELAT (mécanicien-radio)et l’adjudant COAT (plongeur).

SAUVETAGE DU 15 SEPTEMBRE

Le 15 septembre 1980, à 15H15, le commandant de groupement nous donne l’ordre de décoller pour rechercher deux pêcheurs professionnels partis à bord d’une pirogue de 6,50m, de couleur jaune, le 14 septembre au petit matin et n’ayant pas reparu depuis.

A bord de l’hélicoptère se trouvent : le MDLC UFFERTE (pilote) , le MDLC MICHELAT (radio), le gendarme HENRY (mécanicien-treuilliste) et l’adjudant COAT (plongeur).

La zone côtière de l’île de Cayenne, jusqu’au delà des îlets est explorée, sans résultat.

Après une heure quarante de vol, nous découvrons un individu assis, les bras croisés, sur un tronc d’arbre à la limite des palétuviers et de l’eau, à environ six kilomètres au nord-ouest de la pointe Macouria. A côté de lui, une branche surmontée d’un morceau de polystyrène blanc est planté dans la vase. Nous nous mettons en vol stationnaire en lui faisant face. Au bout de quelques secondes, il nous fait un signe en forme d’appel.

En raison d’extrêmes difficultés pour arriver à cet endroit par voie terrestre (marécages) et de l’absence d’embarcation dans ce secteur, nous estimons qu’il s’agit là d’un de nos naufragés.

Après avoir signe à cette personne d’attendre sans bouger, nous rentrons à l’hélistation pour faire un complément de carburant. Il est 18H04.

Nous décollons à 18H10, en vue d’effectuer la récupération de la personne découverte.

Cayenne, au loin le confluent des deux rivières (Cayenne et Montsinéry).

Pour cette opération, se trouvent à bord : le MDLC UFFERTE (pilote), le gendarme HENRY (mécanicien-treuilliste) et le MDLC MICHELAT (radio).

Revenus sur les lieux, le MDLC MICHELAT est treuillé sur un tronc d’arbre à quelques mètres du rivage. En effet, c’est impossible d’aller plus près en raison de l’équilibre instable des palétuviers, à moitié déracinés par la houle.

Le MDLC MICHELAT fait signe à la personne de venir le rejoindre et la sangle. Ojna SAMIENTE qui était effectivement une des personnes recherchées est hissé à bordpar hélitreuillage. Nous récupérons notre collègue dans la foulée.

A notre demande SAMIENTE nous indique que son camarade doit être échoué plus à l’ouest de la côte. Nous nous dirigeons aussitôt dans cette direction, en translation lente, très près de la végétation et repérons le second naufragé, à environ deux kilomètres de là. Après avoir déposé SAMIENTE à l’hélistation, nous retournons sur les lieux récupérer son camarade, Costa FERREIRA, dans les mêmes conditions.

L’opération de sauvetage se termine au crépuscule. Une ambulance du SAMU de Cayenne vient recueillir les deux naufragés, physiquement éprouvés.

Selon leurs dires, ils auraient coulé le 14 septembre, vers 10 heures du matin, au large de Cayenne.

Ils se seraient échoués sur la côte où nous les avons découverts, en fin de matinée, y auraient passé la nuit et la journée du 15 septembre.

Un commentaire

  1. Très fière de ce récit et tellement de bons souvenirs dans cette gendarmerie de la Madeleine à Cayenne ! J y suis retournée 32 ans après, tout avait bien changé certes mais les gens, les odeurs, les bruits…. Tout est resté tel quel …. C est un territoire particulier, une terre incroyable et une culture tellement riche.

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