Il y a tout juste 70 ans, le garde René COULON, était abattu lors d’une mission d’évacuation sanitaire à proximité du village de Van Dinh. René COULON avait 29 ans lorsqu’au mépris du danger son Hiller 360 fut pris sous le feu du Vietminh et s’écrasa sous les yeux des militaires du poste de Nga Ba Tha au Tonkin. René Coulon était affecté depuis le 17 avril au GFHATI*
* Groupement des Formations d’hélicoptères de l’Armée de Terre en Indochine.
Les insignes du GFHATI et de l’ELA 53.
Breveté pilote hélico n° 28, le l5 avril 54 avec 130 heures de vol, le Garde René Coulon est arrivé en Indochine dès le l7 avril. Affecté au GFHATI, il est « prêté ›› (avec Machu pilote, Morin et Filippi, mécanos) à l’ELA 53 basée à Gia Lan au Tonkin. En 6 semaines, dans les collines calcaires du nord de l’lndochine, recouvertes par une jungle épaisse, parfois déchirées par quelques terrasses aménagées en rizières, René Coulon effectue en solo plus de 50 Evasan en 60 heures de vol. Dont notamment celle du 31 mai 54, au poste de Chu-Noi où son Hiller 360 fut touché par les tirs ennemis sans que cela ne perturbe son sang-froid, ni l’exécution de sa mission qui était d’évacuer 2 blessés du poste encerclé par les viets. Pour cet exploit on lui remettra la croix de guerre des TOE avec étoile de bronze.
Nous sommes le 14 juillet 54, le poste de Nga Ba Tha situé en zone viet a été harcelé toute la nuit. Comme d’habitude, avec le jour, les petits hommes en noirs se sont retirés, Ils se noient dans la population – terrorisée ou complice ? – du village voisin de 2 km environ et qui est réputé comme «appartenant » aux rebelles. Là, ils vaquent maintenant aux travaux des champs dans les rizières comme de paisibles paysans. Bien malin celui qui pourra faire la différence…
Au poste, il y a eu de la casse. Deux gars sont salement amochés. Et le sergent demande au GATAC une évacuation sanitaire par hélico. La demande est analysée puis retransmise pour exécution à l’ELA 53 où René Coulon est pilote d’alerte. Il décolle de la base de Bag-Thaï à 14 heures, seul aux commandes de son Hiller 360, immatriculé F -SCMX.
,, Moins de 3 mois après son arrivée, un mois après que Pierre Mendes France a annoncé son intention d’en finir avec le problème indochinois, moins d’un mois avant le cessez-le-feu, René Coulon, 29 ans, était déjà un héros et entrait dans la légende ,,
On lui a donné les coordonnées du point de rendez-vous. C’est à une petite demi-heure de vol dans une zone de rizières, à proximité du village de Van Dinh distant de 2 km environ du poste. Cap au sud-est, il rejoint la zone, repère le village, le survole et à partir de là, cherche le point de rendez-vous. Que se passe-t-il alors ? On est réduit aux supputations. Il est vraisemblable qu’un rebelle a trouvé l’occasion trop belle pour faire un carton… La croix rouge ? Un détail dont les viets ne se sont jamais encombrés ! À moins de 2 km à l’est de la position, les supplétifs du poste assistent impuissants à la scène. Ils voient l’hélico « se mettre brutalement en descente avec des oscillations latérales ». Le pilote a-t-il été touché par un sniper viet et a-t-il perdu le contrôle de son engin ? Ou bien est-ce l’hélicoptere qui a fait les frais des tirs ennemis ? On ne le saura jamais.
En effet, les supplétifs du poste rendent compte et se ruent vers les lieux du crash. René Coulon a tenté de se poser en catastrophe. Mais en courte finale, la spatule du patin gauche a heurté une diguette et l’hélico est passé sur le dos. René Coulon a été écrasé par sa machine et présente une blessure mortelle à la tête. « ll ne portait pas de casque, ceux-ci n’étant pas prévus en dotation à la section hélicoptères. ›› Compte tenu de la situation locale, ordre est donné par le GATAC aux militaires du poste de Nga Ba Tha, d’incendier l’épave pour la soustraire aux rebelles. Il est 14H45. Lorsque la commission d’enquête présidée par le Capitaine Darbois arrive sur les lieux le 16 juillet 1954 à 15 heures, elle trouve l’épave totalement consumée et il lui sera impossible de déceler les causes exactes du crash.
Moins de 3 mois après son arrivée, un mois après que Pierre Mendes France a annoncé son intention d’en finir avec le problème indochinois, moins d’un mois avant le cessez-le-feu… René Coulon, 29 ans, était déjà un héros et entrait dans la légende. Il est le premier des 25 gendarmes de tous grades morts en SAC – en Service Aérien Commandé. Il est aussi l’un des 18 officiers et 693 gendarmes morts en Indochine.
Le 8 décembre 54, quand le GFHATI s’émancipe de l’ELA 52 et s’installe (enfin !) dans ses propres locaux de la base de Lattre de Tassigny, hommage de ses chefs à la valeur de ce jeune héros, le bâtiment technique prend le nom de « Garde Coulon de la Gendarmerie ».
Merci pour ce bel article.
J’aurai juste une remarque quant à l’appareil que pilotait le garde Coulon. Ce n’était pas un Hiller UH-12A (aussi appelé commercialement Hiller 360) mais un H-23A. Le distinguo n’est pas négligeable, parce que cette évolution militaire de l’UH-12A -qui lui était une version civile- était à contrario nettement moins performante. Le moteur était le même (Franklin 6V4-178-B33) mais à la demande de l’USAF, la transmission cyclique directe depuis le plateau, bien visible sur les photos, avait été remplacée par un manche cyclique « classique » et une tringlerie passant dans le plancher puis remontant derrière la cloison de l’habitacle ; donc nettement plus lourde. La batterie elle aussi était plus lourde, car plus puissante, conformément aux normes militaires. Enfin les H-23A étaient revêtus de 4kg de peinture vert olive sombre (olive drab), au lieu du simple voile de vernis appliqué sur les surfaces des UH-12A. Au résultat, le devis de masse accusait plus de 60 kg supplémentaires à vide par rapport à l’UH-12A, ce qui dans les conditions de l’Extrême-Orient s’est avéré catastrophique : il n’était généralement pas possible d’emmener plus d’un blessé… Quand les machines sont rentrées d’Indochine, l’Armée de l’Air les a utilisées pour la formation de ses pilotes à Chambéry, non sans les faire convertir en UH-12B. Avec patins et moteur de 200ch…
En fait, il semble bien que les deux seuls H360 de l’ELA 52 étaient ceux du Service de santé (machines civiles, l’une achetée par le SS et l’autre offerte par la ville de Bordeaux), les 4 autres étaient des H23. Quant à ceux de l’ELA 53, les 6 étaient des H23.
Pourtant… Je détiens une photo de H360 alignés dans un hangar… Si je me réfère aux révélations de Philippe, elle doit être plus récente ???
Ou alors , ce serait des UH-12A, en attente de transfo en H23 ???
A cette époque tout était possible… Qu’on en juge…
Aujourd’hui, il est inimaginable qu’un commandant d’unité sub-détache un pilote de Saigon à Hanoï pour une mission de guerre, de son propre chef !!!
Et pourtant la position administrative de Coulon était la suivante : affecté à la 12ème légion de Gie Mobile à Saïgon, détaché au GFHATI de Crespin à Tan Son Hut (banlieue de Saïgon), pour y servir sur S55. Mais ceux-ci, en provenance de Corée, sont encore en cours de montage et Cespin s’inquiète de ce que ses jeunes pilotes ne volent pas… Il s’en ouvre à son ami Santini. Les deux compères s’entendent : Nécessité vaut autorisation (!!!) Crespin (AdeT) prête lesdits pilotes (Coulon et Machu + 2 mécanos) à Santini (ELA52 de Saïgon) qui envoie Coulon à Hanoï (ELA53) où il est tué…
Il a fallu rendre compte !!!
D’ailleurs dans la foulée, Machu, et les deux mécanos ont réintégré fissa le GFHATI…